Comment ça marche ? Le stockage intersaisonnier de chaleur
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Stocker sous forme de de l’énergie produite pendant l’été puis la réutiliser pendant l’hiver pour le chauffage de bâtiments : tel est l’objectif principal du « stockage intersaisonnier de chaleur » (en anglais, « Seasonal Thermal Energy Storage », STES). Le stockage est réalisé en sous-sol, profond ou proche de la surface.
© Erik Christensen – Wikimedia commons - À Marstal (Danemark), les panneaux thermiques solaires chauffent de l’eau stockée dans une vaste fosse avant réutilisation de la chaleur dans les maisons.
Le principe de base
Il s’agit de collecter de la chaleur « durable », souvent produite par des panneaux solaires thermiques, ou de la chaleur « fatale », généralement récupérée d’un processus industriel et qui serait perdue dans des conditions normales. Captée à un moment où l’on n’en a pas besoin, la chaleur est stockée en sous-sol et réutilisée plusieurs mois plus tard, selon les besoins.
Cette technique, qui commence à se développer, est utilisée dans le secteur de l’habitat pour réaliser des économies dans le chauffage de bâtiments. Elle peut aussi servir à leur refroidissement avec des systèmes où la « fraicheur » d’une saison froide peut être conservée et utilisée pendant la saison chaude.
L’exemple de Marstal (Danemark)
Des pays comme le Danemark, l’Allemagne ou le Canada s’intéressent particulièrement à ce stockage de chaleur. Il peut être appliqué à l’échelle d’un écoquartier ou de maisons individuelles (le Danemark possède plus de 2 500 petites installations). Prenons l’exemple de ce qui est en 2019 la plus grande installation, à Marstal, au Danemark1.
Marstal est la principale agglomération (2 300 habitants) de l’ile de Ærø, dans la partie sud du Danemark. A partir des années 1990, elle s’est peu à peu convertie aux avec une centrale de (chaleur et ) fonctionnant au bois et un parc de panneaux solaires thermiques de 33 000 m2. La chaleur que produisent ces capteurs chauffe de l’eau qui est stockée dans une fosse de 75 000 m3 creusée dans le sol. Elle est restituée pendant l’hiver, à une période où l’ensoleillement est très faible, et alimente les quelque 1 500 logements qui sont raccordés au réseau local.
La fosse principale mesure dans sa partie supérieure 88 m sur 113 m, la surface d’un terrain de football. Elle descend à 12 mètres sous le niveau du sol, avec des côtés en pente douce. La fosse est remplie d’eau avec des couches de sable et d'argile et recouverte d’une couverture isolante en polyéthylène qui peut supporter des températures jusqu’à 80 °C.
Les différentes méthodes
L’installation de Marstal, avec une fosse à fleur de terre, n’illustre qu’une des nombreuses méthodes de stockage de la chaleur en sous-sol.
Elles se répartissent en deux grandes familles : les stockages souterrains et les stockages de surface.
Les stockages souterrains
L’eau chaude est stockée à une profondeur de plus de 10 ou 15 mètres. La méthode rejoint alors les techniques bien rodées de la
.
L’eau chaude est soit introduite dans une série de sondes en circuit fermées2, soit injectée dans un
profond3.
Par exemple, l’écoquartier de Drake Landing, à Okotoks, dans l'Alberta au Canada, répartit la chaleur dans 144 conduites profondes, creusées à plus de 37 m sous la surface et couvrant une superficie de 35 m de diamètre. La structure est recouverte de sable et d’argile, ainsi que d’une membrane imperméable, ce qui permet d’atteindre vers la fin de l’été environ 80 °C.
Dans le cas de l’aquifère, l’eau chauffée en surface alimente la source chaude de la nappe. Un doublet géothermique permet de remonter et réinjecter l’eau souterraine. Un projet est à l’étude en Ile-de-France, en utilisant l’aquifère du Dogger.
Les stockages de surface
L’eau chaude est maintenue dans des fosses (comme dans le cas de Marstal), ou dans des réservoirs préfabriqués puis enterrés pour une meilleure isolation. Pour les petites installations, des circuits horizontaux de tuyaux peuvent être placés autour d’un bâtiment à très faible profondeur.
Les rendements et les coûts
Selon les données des premières installations, les rendements paraissent satisfaisants et les coûts d’exploitation faibles. Les rendements (rapport entre la chaleur utilisée et la chaleur stockée) sont supérieurs à 50 %. Les coûts d’installation peuvent être élevés ce qui tend à réserver ces techniques à de nouvelles constructions.
L’Académie des Technologies a publié un rapport très complet sur le sujet intitulé : « Le stockage intersaisonnier de chaleur : un atout pour le climat et la souveraineté ».
1 L’unité de Marstal - https://www.solarthermalworld.org/news/denmark-23-mwth-cover-55-heat-demand-1500-households
2 Une nomenclature a été établie en anglais. Les sondes constituent le système BTES (B comme borehole)
3 Système ATES (A comme aquifer)