Le transport du pétrole par voie terrestre
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Pour des raisons économiques, géographiques ou politiques, il peut être préférable que le pétrole voyage par voie terrestre plutôt que par voie maritime. Il emprunte alors des oléoducs, canalisations spécifiques qui relient les ports, les raffineries et les lieux de consommation.
© Thinkstock - Les oléoducs assurent le transport du pétrole par voie terrestre
Les oléoducs (pipelines en anglais) sont de gros tuyaux par lesquels peuvent transiter chaque année plusieurs dizaines de millions de tonnes de pétrole. L'oléoduc le plus long du monde est celui de Druzhba (5 327 km) qui traverse huit pays : Russie, Biélorussie, Ukraine, Pologne, Allemagne, République tchèque, Hongrie et Slovaquie.
L’oléoduc, alternative terrestre
En général, l’industrie pétrolière privilégie le transport du pétrole par voie maritime parce qu'il est très souple : au contraire d'un oléoduc, un bateau ne suit pas toujours le même trajet et s'adapte à la demande. Néanmoins, il arrive que le pétrole doive obligatoirement traverser des terres, par exemple s'il circule vers un pays n'ayant pas d'ouverture sur la mer. Dans ce cas, il peut se révéler plus simple qu'il emprunte des oléoducs, mode d'acheminement qui reste moins onéreux que le transport routier ou ferroviaire :
- dans les pays très étendus comme la Russie, ils sont utiles pour amener le pétrole vers les ports en vue de son exportation par bateau ;
- en Europe de l'Ouest, il existe des réseaux d'oléoducs qui, depuis les ports, transportent le vers les raffineries situées à l'intérieur des terres. On les utilise aussi pour envoyer vers les grands centres de consommation les produits finis sortant des raffineries (carburants et matières premières pour la ).
La surveillance des oléoducs
Pour que le pétrole brut circule à l'intérieur de ces canalisations, on augmente sa pression tous les 60 à 100 kilomètres, dans des stations de . Ainsi, dans un oléoduc, le pétrole parcourt 2 mètres par seconde ou 7 kilomètres/heure, soit la vitesse de déplacement moyenne d'un éléphant…
Qu'il s'agisse du transport maritime ou par oléoduc, la sécurité des opérations est un facteur essentiel. Si un tuyau est percé ou rompu à cause d'un accident ou d'un sabotage, une fuite éventuelle peut être détectée rapidement, parce qu'une brutale chute de pression est alors enregistrée dans le tuyau. Lorsque l'origine de la fuite est localisée, on arrête dès que possible le flux de pétrole dans les stations de pompage afin de limiter la pollution.
En revanche, les fuites dues à la des tuyaux peuvent prendre des proportions importantes. En effet, le pétrole contient des gaz acides comme le ou l' sulfuré qui, à terme, attaquent les parois métalliques des oléoducs. Pour prévenir de tels accidents, il faut donc inspecter les installations et remplacer ces tuyaux régulièrement, afin d'éviter qu'ils ne se trouent.
Les enjeux géopolitiques des oléoducs
Les oléoducs recouvrent de grands intérêts économiques et géopolitiques et donnent souvent lieu à de difficiles négociations ou des débats environnementaux, voire des affrontements militaires. En voici quelques exemples frappants.
- Europe de l’Est : tensions géopolitiques autour de l’oléoduc Druzhba
L’invasion de l’Ukraine par la Russie, en février 2022 a fortement perturbé le fonctionnement de l’oléoduc Druzhba, qui approvisionnait jusqu’en 2023 plusieurs pays européens : l'Allemagne, la Pologne, la République tchèque, la Slovaquie et la Hongrie. En réaction aux sanctions internationales, les trois premiers pays ont cessé leurs importations de pétrole russe,tandis que la Slovaquie et la Hongrie ont maintenu leurs achats. Cette situation a engendré des tensions, notamment après des frappes de drones ukrainiens sur l’oléoduc, suscitant la réaction du gouvernement hongrois. D’autres attaques ont visé le port russe de Primorsk, sur la mer Baltique, point d’arrivée d’un réseau d'oléoducs terrestres.
- Amérique du Nord : débats environnementaux et politiques
Le projet d’extension de l’oléoduc Keystone XL, destiné à transporter le pétrole issu des sables bitumineux du Canada vers le golfe du Mexique, a suscité de vives oppositions. En novembre 2015, le président Barack Obama avait annulé sa construction. Son successeur Donald Trump l’a relancé en mars 2017, avant que Joe Biden ne l’interrompe à nouveau. En février 2025, Donald Trump, redevenu président, a exprimé son souhait de relancer le projet.
- Afrique : défis logistiques et sécuritaires
De nouveaux oléoducs sont en cours de développement, notamment en Afrique et au Moyen-Orient. Le Niger–Benin Export Pipeline (NBEP), long de 1 950 km, est entré en service en 2024. Construit par une entreprise chinoise, il permet d’acheminer le pétrole du Niger vers l’océan Atlantique, entre Agadem et Cotonou. Sa mise en service, initialement prévue en janvier, a été retardée par un différend frontalier entre les deux pays, puis par une attaque menée par un groupe rebelle. L’oléoduc a été réparé et remis en service en août 2024. Il s’agit du plus long oléoduc d’Afrique. Au Canada, le Trans Mountain Expansion pipeline, long de 1 150 km, a été inauguré en mai 2024. Il double une liaison existante entre Edmonton et la côte pacifique.